De toutes les figures mythiques de la capoeira, Mestre Bimba est sans conteste la plus importante. Sans lui et son génie visionnaire, la capoeira aurait probablement disparu avec les derniers petits-fils d’esclaves, comme tant d’autres expressions culturelles afro-brésiliennes issues de l’époque de l’esclavage.
Né en 1900 à Salvador de Bahia, Manoel dos Reis Machado doit son surnom de “Bimba” (zizi en français !) à un pari effectué entre sa mère et la sage femme quant au sexe de l’enfant à venir. De son enfance proprement dite on ne sait pas grand chose, sinon que d’avoir grandi dans un quartier pauvre l’aura initié très tôt à la “malandragem” qui le caractérisa tout au long de sa vie, et qui lui était si chère !
[…] Extrêmement doué pour le combat, Bimba reçoit très vite le surnom de “três pancadas”, trois coups, car la violence de ceux-ci en fait le maximum que ses adversaires peuvent encaisser avant de s’écrouler ou d’abandonner ! Précoce, on dit qu’il enseignait déjà à un petit groupe d’élèves dès l’âge de 18 ans. Obsédé par l’efficacité en combat, il ressent très vite la nécessité impérieuse de débarrasser la capoeira traditionnelle de tout son folklore et ses rituels inutiles à ses yeux, et de la moderniser afin de pouvoir faire face aux autres styles de combat sans se ridiculiser.
Il convoque donc les autres capoeiristes de l’époque (y compris Waldemar, Pastinha, et bien d’autres encore) et leur fait part de ses inquiétudes et de ses intentions, les invitant à participer à ses côtés à la création de cette capoeira moderne. Ils acceptent dans un premier temps, puis se rétractent, voyant d’un mauvais oeil l’idée de Bimba d’ouvrir la capoeira aux Blancs (les riches !) pour la sortir de sa clandestinité.
C’est donc seul, quoiqu’aidé probablement par certains de ses élèves les plus proches que Bimba crée sa Luta Regional Bahiana, offciellement en 1932, mais qu’il déclarait avoir déjà toute prête au milieu des années 1920. Il faudra encore plusieurs années avant qu’elle ne soit officiellement autorisée, en 1937, par le gouverneur local, admirateur de Bimba, qu’il invite même à se produire en exhibition dans son palais, suprême privilège.
Le génie de Mestre Bimba fut de créer une méthode systématique d’apprentissage, progressive et rationnelle, là où la capoeira s’apprenait auparavant uniquement en regardant et en jouant dans les rondes (dangereuses), beaucoup plus à l’instinct donc.
Malgré son goût prononcé pour le combat, Bimba conserva tout de même certains éléments de la capoeira traditionnelle pratiquée à Bahia, la musique notamment. En plus d’être un combattant redoutable, Bimba était également un joueur de berimbau virtuose et inspiré, et il établit 7 toques (rythmes) pour sa Capoeira Regional, certains existant déjà, et d’autres qu’il créa lui-même (Banguela, Sao Bento Grande, Iuna, Cavalaria, Amazonas, Idalina et Santa Maria).
[…]
Mestre Bimba termine sa vie en 1974 à Goiania, affaibli par une longue maladie, seul et amer, exilé un an plus tôt à la recherche d’une vie meilleure sur les promesses d’un de ses élèves, qu’il ne put tenir pour diverses raisons. L’annonce de sa mort fit l’effet d’un électrochoc, et toutes les académies restèrent fermées durant une semaine entière à Salvador en son hommage, où ses élèves, firent rapporter ses restes quelques années plus tard.
Mestre Bimba fut sans conteste le personnage-clé de la capoeira du 20e siècle, et son héritage inestimable pour les générations à venir, au charisme si fort que, plus de 40 ans après sa mort, tous ceux qui l’ont approché parlent encore de lui avec une émotion palpable dans la voix !
Règlement intérieur de l’académie de Mestre Bimba
1. DEIXE DE FUMAR. E PROIBIDO FUMAR DURANTE OS TREINOS.
Ne fume pas. Il est interdit de fumer pendant les entrainements.
2. DEIXE DE BEBER. O USO DO ALCOOL PREJUDICA O METABOLISMO MUSCULAR.
Ne bois pas. La consommation de l’alcool nuit au métabolisme musculaire.
3. EVITE DEMONSTRAR AOS SEUS AMIGOS DE FORA DA “RODA” DE CAPOEIRA OS SEUS PROGRESSOS. LEMBRE-SE QUE A SURPRESA E A MELHOR ALIADA NUMA LUTA.
Evite de montrer tes progrès à tes amis hors de la roda de capoeira. Rappelle-toi que la surprise est la meilleure alliée dans un affrontement.
4. EVITE CONVERSA DURANTE O TREINO. VOCE ESTA PAGANDO O TEMPO QUE PASSA NA ACADEMIA E, OBSERVANDO OS OUTROS LUTADORES, APRENDERA MAIS.
Evite de parler pendant le cours. Tu paies le temps que tu passes a l’académie, et en observant les autres lutteurs, tu apprendras plus.
5. PROCURE GINGAR SEMPRE.
Cherche toujours à faire la ginga.
6. PRATIQUE DIARIAMENTE OS EXERCICIOS FUNDAMENTAIS.
Pratique quotidiennement les exercices fondamentaux.
7. NAO TENHA MEDO DE SE APROXIMAR DO OPONENTE. QUANTO MAIS PROXIMO SE MANTIVER, MELHOR APRENDERA.
N’aie pas peur de t’approcher de l’adversaire. Plus proche tu te maintiens, mieux tu apprendras.
8. CONSERVE O CORPO RELAXADO.
Garde toujours ton corps relâche.
9. E MELHOR APANHAR NA “RODA” QUE NA “RUA”.
Il vaut mieux prendre un coup dans la roda que dans la rue.